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L'ouvrage d'Annabelle Marion, tiré de la thèse de doctorat qu'elle était venue nous présenter aux dernières Rencontres Giono à Manosque, vient de paraître aux éditions Classiques Garnier, chères à la bibliothèque de jeunesse de l'écrivain...
Annabelle Marion étudie dans cet ouvrage comment, après les épreuves de la guerre et de la prison, Giono est parvenu à une "réinvention " de lui-même et de son art d'écrivain, qui va lui permettre de reconquérir une audience nouvelle et élargie auprès du public, et une autorité définitive dans le monde des lettres. Annabelle Marion, Renaissance de Giono. La reconstruction de l'auteur après la Seconde Guerre mondiale, éd. Classiques Garnier, 2024, 630 p., 46€. Au sommaire de cette lettre n°35 : l'édito sur Giono aux J.O (...de Rome, en 1960), le Prix Giono 2023 à Gaspard Koenig, et l'interview de Camille Galtier, Maire de Manosque et Président de la DLVA : "Lorsque j'étais enfant, je dévorais les livres de Giono..." Les adhérents de l'Association recevront sous peu cette lettre, accompagnée de la carte de voeux 2024 de Sylvie Giono. Elle sera accessible en ligne sur notre site fin janvier.
Gaspard Koenig s’est vu décerner le Prix Giono 2023 par Paule Constant, présidente du jury, et Sylvie Giono. Au-delà de son originalité et de sa qualité d’écrivain (de philosophe aussi, animateur du groupe de réflexion« GénérationLibre »), la connaissance et la familiarité qu’entretient Gaspard Koenig avec l’œuvre de Giono justifiaient pleinement ce choix. Le roman primé, Humus (éd. de L’Observatoire, 2023, 380 p., 22€), multiplie d’ailleurs les clins d’œil à l’œuvre de Giono, en particulier à Un roi sans divertissement. À l’occasion d’une chasse nocturne aux vers de terre (à la lumière des lampes-torches de leurs téléphones portables !), un des deux héros de Humus, Arthur, se souvient ainsi d’un livre dont la lecture l’avait troublé :
Humus est le récit désopilant (mais tragique aussi) des mésaventures de deux jeunes « bifurqueurs », écolo-idéalistes en rupture de ban d’AgroParisTech, qui rêvent de refaire le monde avec le concours des lombrics, et d'échapper ainsi à un « système » dont ils finiront par être les victimes. On rit beaucoup à la lecture de cette fable (ou satire ?) écolo-environnementaliste que Giono aurait sans nul doute appréciée, tant elle nous fait réfléchir aussi sur la « marche du monde »…
Étrange ! Sur un disque récent d’un duo de musiciens belges que j’ai entre les mains un titre m’interpelle : « Giono ». Giono a été adapté ou évoqué au cinéma, au théâtre, en bande dessinée, en peinture, en chanson… mais pas encore, à ma connaissance en tout cas, en musique… Sauf peut-être par Miquèu Montanaro pour Prélude de Pan. C’est donc ce que vient de faire le pianiste Pierre Anckaert, dans ce morceau intitulé « Giono » sur le disque – Éphémère – qu’il a réalisé avec le flûtiste Stefan Bracaval… Et pourquoi donc ? Parce que, âgé d’une quarantaine d’années, il avait découvert Un de Baumugnes… et que la lecture du roman l’avait marqué au point de « retrouver du Giono en lui ». Ce sont ses propres mots quand nous avons bavardé pendant l’entracte du concert de dimanche dernier au club de jazz « Heptone » en Brabant wallon. Voilà les quelques lignes que Pierre Anckaert m’a écrites pour préciser sa démarche : « J’ai rencontré Giono par hasard. Il était intercalé parmi d’autres auteurs dans une cabane à livres à Laeken [Bruxelles]. J’ai été intrigué par la couverture aquarelle en format livre de poche. À la première lecture sa poésie m'a d’emblée séduit. Et donc naturellement son écriture a laissé ses traces dans mon travail en tant que musicien-compositeur. La découverte de Colline et de Refus d’obéissance par la suite n’a que renforcé mon estime pour cet auteur. » Si vous voulez en savoir plus sur cette musique inspirée par Giono, découvrez Éphémère, le nouvel album de Stefan Bracaval et Pierre Anckaert (https://www.stefanbracaval.com) Michèle Ducheny
Composé en 1923, c'est la première oeuvre de Giono à avoir été éditée sous forme d'une publication autonome. Avec les autorisations de Sylvie Giono, pour les textes et Jacky Michel pour les gravures, l'association des Amis de Jean Giono publie, à l'occasion de son cinquantième anniversaire, une nouvelle édition en tirage limité.
On savait depuis longtemps qu'une abondante correspondance avait accompagné l'amitié entre Martel et Giono dans les années 30, mais les lettres récemment acquises ont permis de mieux situer le déroulement des faits dans le respect de la chronologie, notamment pendant les années de guerre.
Présidé par Sylvie Giono et Paule Constant, le Prix Jean Giono 2022, parrainé par la Fondation Jan Michalski, a été décerné le 8 novembre à Sandrine Collette pour son cinquième roman, On était des loups (éd. J.-C. Lattès, 2022). Également récompensé par le Goncourt des lycéens, le roman raconte le difficile apprentissage de la paternité par une sorte de coureur des bois, personnage un peu marginal de chasseur que la mort de sa compagne, tuée par un ours, plonge dans la solitude. Incapable de se débarrasser du petit garçon de cinq ans (qu’il envisage pourtant à plusieurs reprises d’abandonner, et même de noyer), il va se prendre lentement pour lui d’une affection infrangible au fil des épreuves terribles que leur infligent la sauvagerie de la nature mais aussi la cruauté des hommes. Sandrine Collette a conservé de ses précédents récits (Des nœuds d’acier, 2013 et Un vent de cendres, 2014) l’esprit du thriller, ici contrebalancé par une analyse psychologique extrêmement subtile. Et sa sensibilité à la nature se trouve ici exaltée par les grands espaces d’un pays qui emprunte au Grand Nord canadien la magnificence et la violence inhumaine de ses paysages. Mais, dans On était des loups, le plus réussi et le plus bouleversant reste l’évocation de cette relation paternelle aussi improbable au début du récit qu’immuable à la fin, illustrant la saisissante formule de Wordsworth dans son magnifique poème The Rainbow (avant que Freud ne la reprenne à sa sauce…) « L’enfant est le père de l’homme »… Le talent de « raconteuse d’histoires » de Sandrine Collette, tout autant la qualité de son écriture, l’originalité de ses personnages d’ « âmes fortes » et sa sensibilité au monde naturel, la désignaient à l’évidence pour cette distinction décernée à une œuvre bien dans l’esprit de celle de Jean Giono. Christian Morzewski
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